« Octobre 2009. Depuis des mois, nous parcourons les Forges de Clabecq, un site sidérurgique voué à la démolition, en vue de le photographier en profondeur afin qu’il ne disparaisse pas complètement. C’est un dimanche après-midi d’octobre 2009. Le temps est instable et souvent changeant, mais la lumière est belle et ajoute une touche de tragique sur ces lieux désolés. Après avoir passé une journée à réaliser des photos sur le site, nous attendons que le garde vienne nous ouvrir la grille, ce qui nous permettra de quitter les lieux. Il arrivera dans un quart d’heure, vingt minutes.
Me reste alors un peu de temps pour réaliser un ou deux clichés. Des énormes tas de ferrailles trônent sur une esplanade lunaire et faisant face à cette usine qui vit ses derniers temps. Je m’avance et découvre de gros engrenages. Ceux-ci symbolisent la révolution industrielle, le machinisme, l’avènement de la mécanique. Mais toutes ces pièces sont brisées, écorchées, arrachées. A l’arrière-plan, nous découvrons les trois hauts fourneaux des Forges qui attendent leur fin inéluctable. Tout d’un coup, le ciel s’assombrit en se chargeant de nuages noirs.
J’ai là devant moi la conjonction de trois éléments forts : Les engrenages brisés et l’industrie lourde qui disparaît, comme un au revoir tragique à l’ère industrielle et au-dessus de tout cela, un ciel menaçant, symbolisant les temps incertains d’une ère postindustrielle que l’on dit instable et précaire. Juste à l’inverse de la période industrielle… J’ai trouvé qu’il y avait dans cette scène quelque chose de prémonitoire et que la photo que j’en prendrais le représenterait bien. »
Gilles Durvaux, membre du Photo-Club de Pont-à-Celles